Ronan Raffray
Sur un plan juridique,l’évolution des enjeux qualitatifs du vin s’exprime historiquement par le passage de la qualité de vin (qu’est-ce qu’un vin ?) à la qualité du vin (qu’est-ce qu’un bon vin ?). La qualité de vin évoque ces temps décisifs ou la fraude a contraint le législateur à dire que n’est vin que la boisson cumulant fermentation alcoolique et provenance du raisins frais. La qualité du vin est en revanche une question très présente, la qualité liée à l’origine dominant la hiérarchisation qualitative de la production viticole. Les dernières décennies ont vu naître des questionnements complémentaires, rattachables à ce que l’on peut identifier comme constitutive d’une qualité environnementale.
Les vins biologiques, biodynamiques et naturels occupent ici une place prépondérante mais bien d’autres questions juridiques, en lien avec la Responsabilité Sociale et Environnementale, émergent à leur tour. La RSE s’épanouit comme ailleurs en matière viticole. L’enjeu éthique, entendu comme un enjeu social et environnemental, touche d’ailleurs au fondement même de la production viticole, laquelle s’appuie comme toute agriculture, sur l’interaction entre l’homme et son environnement naturel. Elle révèle une nouvelle préoccupation des professionnels, en accord avec les nouvelles demandes de leurs partenaires, qu’ils soient eux-mêmes professionnels ou consommateurs. Le Code rural et de la pêche maritime identifie ainsi comme enjeu « une agriculture produite dans des conditions économiquement et socialement acceptables par tous, favorisant l’emploi, la protection de l’environnement et des paysages et contribuant à l’atténuation et à l’adaptation aux effets du changement climatique ». Comme les autres entrepreneurs, les viticulteurs s’emparent alors de référentiels ou créent leurs propres outils, combinent les normes contraignantes et les normes de droit souple, recourent à la reddition extra-financière pour faire connaître leurs actions. Le juriste y perd parfois son latin.
Cette étude juridique s’appuie sur les démarches spontanées des acteurs français de la filière vin. Elle vise à appréhender juridiquement ces nouvelles normes de responsabilité sociale et environnementale qui concourent à l’établissement d’une nouvelle gouvernance, souvent par autorégulation des professionnels, respectueuse des parties prenantes et participant à un renouvellement de la notion de qualité.