Françoise Sitnikoff
Hélène Chazal
Dans cette communication, nous questionnons l’évolution des rôles et des places des femmes dans la viticulture de la Région Centre-Val de Loire sur les trois dernières générations. Nous utilisons les données recueillies auprès d’exploitant(e)s et de responsables d’organismes professionnels dans le cadre de la recherche « Stratégies de transmission des exploitations et pratiques professionnelles en viticulture » financée par la Région Centre-Val de Loire.
Jusque dans les années soixante-dix, l’unité de production agricole était liée à l’unité familiale. Les femmes d’exploitants agricoles participaient activement à l’activité, généralement sans reconnaissance et sans statut professionnels. En viticulture, la division du travail les exclut de fait de certaines tâches ou de certains lieux (chai…) (Escudier, 2016). Avec la spécialisation en viticulture et l’évolution de leur statut, le rôle des femmes évolue : soit elles prennent une part plus « officielle » dans la vie de l’exploitation, gérant la partie administrative ou participant à l’activité commerciale, soit elles occupent un emploi à l’extérieur de l’exploitation, assurant un revenu fixe à la famille. L’ouverture des femmes aux formations viticoles, l’évolution des modes de vie et des rapports hommes-femmes remettent actuellement à nouveau en cause ces modèles, en relation avec les évolutions du métier de vigneron : l’agrandissement des exploitations viti-vinicoles, la complexification technique des différentes tâches (travail de la vigne, vinification, commercialisation, communication, gestion) et leur multiplication nécessitent une plus grande spécialisation. Les femmes investissent désormais des tâches traditionnellement masculines comme la vinification. Elles prennent leur part dans la nouvelle spécialisation des tâches et participent à la diversification (développement de l’œnotourisme, communication, commercialisation…) (Rieu, 2004). Par ailleurs, elles peuvent pallier le manque d’héritier masculin, permettant ainsi une perpétuation de la lignée et la transmission des places professionnelles (Sposito, 2017). Ce mouvement est d’autant plus fort dans les zones à forte réputation où la préservation du patrimoine professionnel et familial est un enjeu majeur.
Ces transformations influencent les formes traditionnelles de transmission des exploitations et du métier, participant aux redéfinitions des places et des rôles des femmes.